Les bords de nos routes hébergent les abeilles sauvages
Par Denis FRANÇOIS, chercheur en sciences et gestion de l’environnement au Laboratoire EASE – Département AME
C’est un fait établi, les populations d’abeilles sauvages sont en déclin ! Ceci a des conséquences sur de nombreuses plantes cultivées, donc la diversité et la richesse de notre alimentation future. L’impact sur la flore sauvage et les chaînes alimentaires de nos écosystèmes, entraîne des effets en cascade sur de nombreuses autres espèces.
L’Ifsttar étudie les conditions nécessaires pour favoriser l’installation et le redéveloppement de ces populations au bord de nos routes. Les chercheurs partagent, à cette occasion, leurs connaissances dans un ouvrage mis à la libre disposition de tous.
Quel lien entre routes et insectes pollinisateurs sauvages ?
Les causes de déclin des populations d’abeilles sauvages sont multiples : dénaturation des territoires, pratiques agricoles intensives, changement climatique, etc. La construction des infrastructures de transport y contribue à travers la destruction d’habitats naturels et la fragmentation des écosystèmes. La France est aujourd’hui sillonnée par plus d’un million de kilomètres de routes. Les surfaces d’espaces verts comprises à l’intérieur des emprises routières, appelées « dépendances vertes routières » constituent une surface totale estimée à 5 000 km2 pour le réseau routier national.
Elles présentent l’intérêt d’être très peu fréquentées (uniquement par des agents techniques), et depuis quelques années l’usage des pesticides (herbicides, insecticides) y est proscrit. De plus, par endroits, la pratique du fauchage dit « tardif » y a favorisé la réapparition d’une végétation riche en fleurs de diverses espèces locales, similaire à celle des prairies de fauche traditionnelles, qui elles sont en régression en France. Or, ces dernières sont des milieux particulièrement favorables à de nombreux insectes pollinisateurs dont les abeilles et les papillons en particulier.
L’accueil offert par les « dépendances vertes routières » peut donc constituer un enjeu décisif pour la sauvegarde des insectes pollinisateurs dans les zones touchées par les activités humaines
Les abeilles sauvages, c’est quoi ? Vous en connaissez certaines sans le savoir.
Sur le territoire métropolitain, la France compte près de 1 000 espèces d’abeilles sauvages. La plupart de ces espèces sont solitaires et discrètes, donc beaucoup moins connues du grand public que la seule abeille mellifère, élevée par les apiculteurs pour nous donner les produits de la ruche. Les espèces d’abeilles sauvages sont d’une grande diversité de couleurs, de formes et de tailles (quelques millimètres à 3 cm de long). Elles trouvent le gîte et le couvert et contribuent au service de pollinisation, sans aucun besoin de l’homme, grâce aux ressources de leur environnement. Les bourdons sont certainement les abeilles sauvages les plus connues du grand public.
La diversité des abeilles sauvages, à travers leur forme et leur comportement de visite des fleurs, améliore l’ensemble des flux de pollen entre les plantes d’une même espèce (cultivée ou sauvage) et contribue à l’efficacité de leur reproduction. Ce qui pour les espèces cultivées se traduit par une meilleure production, en quantité et en qualité.
Un ouvrage scientifique pour accompagner les initiatives
Dans les territoires marqués par les activités humaines, les « dépendances vertes routières » offrent un potentiel aisément mobilisable pour la sauvegarde des abeilles sauvages, la reconstitution de continuités écologiques (trame verte) et le service de pollinisation réalisé par ces insectes.
L’ouvrage scientifique « Abeilles sauvages et dépendances vertes routières » informe, incite et accompagne les responsables d’infrastructures routières dans leurs démarches de sauvegarde et de maintien des abeilles sauvages dans leur périmètre d’intervention.
Pour aller plus loin ...
Henriksen C.I., Langer V., 2013. Road verges and winter wheat fields as resources for wild bees in agricultural landscapes. Agriculture, Ecosystems and Environment 173, 66–71.
Hopwood J.J., 2008. The contribution of roadside grassland restorations to native bee conservation, Biological Conservation 141, 2632-2640.
Kremen C., 2018. The value of pollinator species diversity, Science 359 (6377), 741-742. DOI: 10.1126/science.aar7614

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L'ouvrage scientifique
dépendances vertes routières »
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sur la librairie de l’Ifsttar
Le reportage
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Écoutez Denis FRANÇOIS,
en charge du projet à l'Ifsttar