Sujet de thèse IFSTTAR

 

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Fiche détaillée :

Titre : Prédiction des déplacements co- et post-sismiques des mouvements de terrain existants via modélisation numérique et approches simplifiées

Laboratoire principal - Référent principal GERS - SRO  -  BOURDEAU LOMBARDI Céline      tél. : +33 181668278 
Directeur du laboratoire principal REIFFSTECK Philippe  -  
Spécialité de la thèse Risques naturels
Axe 3 - COP2017 - Aménager et protéger les territoires
Site principal Marne-la-Vallée
Etablissement d'inscription UNIVERSITE PARIS-EST
Ecole doctorale SCIENCES, INGENIERIE ET ENVIRONNEMENT (SIE)
Directeur de thèse prévu BONILLA HIDALGO Luis-Fabian  -  Université Gustave Eiffel  -  GERS - SRO
Co-directeur de thèse prévu LENTI Luca  -  Université Gustave Eiffel  -  GERS - SRO
Type de financement prévu Contrat doctoral  - Ifsttar

Résumé

Problématique
Longtemps considérés comme un effet secondaire des séismes, les instabilités de versants déclenchées par les tremblements de terre peuvent être responsables d’une part importante des dégâts causés par ce type de sollicitation (Bird et Bommer, 2004). Au cours du vingtième siècle, près de 80 séismes sont à l’origine de 100 000 à 1 000 000 de mouvements de terrain qui ont coûté la vie à plusieurs dizaines de milliers de personnes (Keefer, 1984).
Les études des mouvements de terrain déclenchés par les séismes à travers le monde montrent qu’au-delà des ruptures co-sismiques (ie. ruptures qui se produisent pendant la secousse), les séismes peuvent aussi fragiliser les versants en modifiant leur géométrie (génération de grandes déformations sans pour autant qu’il y ait rupture globale) et leurs propriétés (paramètres mécaniques, rigidité, amortissement), ce qui a pour conséquence de modifier les interactions futures entre les ondes sismiques et le milieu traversé par ces ondes (Martino et al., 2005). Ce phénomène a été très largement documenté lors du séisme de 2016 en Nouvelle Zélande où de très nombreux versants ont partiellement rompu sous l’effet des vibrations sismiques (Massey et al., 2018). Ces versants fragilisés représentent un danger sur le moyen-long terme car ils peuvent subir des ruptures généralisées lors de futurs séismes ou de fortes précipitations. On parle dans ce cas de mouvements de terrain existants réactivés.
La stabilité d’un versant à un instant donné est donc le résultat de tout l’historique, souvent mal connu, des « chargements » (séismes, précipitations) qui ont affecté le versant par le passé. Cela rend la prévision de l’aléa « mouvement de terrain déclenché par des séismes » extrêmement complexe et souligne l’importance de poursuivre des recherches sur cette thématique.

Démarche proposée et résultats attendus
La thèse proposée vise à mieux comprendre comment et pourquoi les conditions de stabilité des mouvements de terrain existants peuvent évoluer. Elle vise aussi à quantifier les déplacements co-sismique et post-sismique (notamment, liés à la réduction de la résistance au cisaillement des matériaux et au changement des conditions hydrogéologiques).

Actuellement, la prévision des déplacements générés par les séismes dans les versants se fait le plus souvent au moyen de méthodes analytiques simplifiées (Martino, 2015) :
- méthode de calcul des déplacements permanents introduite par Newmark en 1965. Cette méthode consiste à évaluer les déplacements susceptibles de se produire dans un mouvement de terrain représenté par un bloc rigide glissant sur un sol support lorsque la résistance des matériaux est inférieure à la force inertielle générée par l’accélération d’un séisme ;
- dérivées de la méthode de Newmark. Il s’agit de lois empiriques qui découlent d’études statistiques. Elles donnent les déplacements de Newmark en fonction de paramètres liés au séisme – Intensité Arias notamment - et à l’accélération nécessaire pour initier un mouvement – accélération critique -.
Ces méthodes sont de plus en plus appliquées à une échelle régionale au moyen des systèmes d’information géographiques (SIG). Partant de modèles numériques de terrain, de cartes de paramètres géomécaniques et de cartes de sismicité, elles calculent, pour chaque pixel, une valeur de déplacement en utilisant des lois empiriques. Les résultats sont souvent caractérisés par une faible résolution spatiale.
Pour dépasser les simplifications et les limites de ces méthodes, des études sont également conduites à l’échelle des versants, au moyen de la méthode de Newmark (et de ses dérivées) mais aussi au moyen de modélisations numériques dans le temps. Les déplacements obtenus par ces deux types de méthodes sont parfois contradictoires (Lenti et Martino, 2012 et 2013).

La thèse proposée a donc pour objectifs principaux :
1- de définir les conditions pour lesquelles l’approche bi-dimensionnelle (2D) de la stabilité des versants par la modélisation numérique dans le temps est essentielle par rapport à l’approche analytique 1D (méthode de Newmark). Les travaux de Lenti et Martino (2012, 2013) ont en particulier montré qu’en fonction de la morphologie des versants (et notamment de leur pente), l’écart entre les méthodes numériques et la méthode de Newmark pouvait varier très significativement. Le caractère peu prédictif de la méthode de Newmark dans les versants à forte pente pourrait être lié à une forte représentation, dans la réponse sismique de ces versants, des ondes de surface. Des travaux récents ont montré que les ondes de surface représentent une part importante de la réponse sismique des sols dans des bassins sédimentaires 2D (Meza-Fajardo et al., 2019). Dans cette thèse, il s’agira d’étudier le rôle et la part des ondes de surface dans la réponse sismique des sols, dans le contexte des mouvements de terrain, piste de recherche qui n’a, à notre connaissance, jamais été étudiée de manière approfondie à ce jour.
2- d’établir des corrélations entre les paramètres liés aux actions sismiques et la réponse des versants potentiellement instables (effets de site et déplacements co-sismiques) selon les caractéristiques de ces versants.
3- de fournir des corrections à apporter aux prévisions analytiques 1D issues de l’application de la méthode de Newmark (et de ses dérivées) dans les SIG pour améliorer la fiabilité des cartes de susceptibilité à l’aléa mouvement de terrain sous séisme à l’échelle régionale.

Cas d’étude
Pour représenter la variabilité potentielle des morphologies des versants et des remplissages géologiques à une échelle régionale et ainsi caractériser la susceptibilité régionale à l’aléa mouvement de terrain sous séisme, plusieurs géométries de versants (hauteur, pente) et de mouvements de terrain (classes de sols représentées par la vitesse moyenne sur les trente premiers mètres VS 30, le gradient des vitesses avec la profondeur B30 (Régnier, 2013), les contrastes d’impédances avec le substratum stable et le mécanisme de rupture) seront considérées et des signaux représentant des contextes sismiques variés (Intensité Arias, contenus fréquentiels) seront appliqués.
Nous étudierons le cas des collines au sud de la ville de Port-au-Prince (Haïti). En 2010, Haïti a été frappé par un violent tremblement de terre qui a généré de nombreux mouvements de terrain et réactivé des mouvements de terrain existants (Gorum et al., 2013). Il s’agit donc d’un cas d’étude approprié à ce projet de thèse. Des données relatives aux géométries et aux propriétés mécaniques des mouvements de terrain présents dans cette zone sismique seront mises à disposition pour cette thèse grâce à la collaboration établie avec Liège Université – un co-encadrement et un accueil à l’IFSTTAR de doctorants et de postdoctorants (géophysique, sismologie et géomécanique) dans le cadre du projet de coopération BE-Haïti (2019-2024) est d’ailleurs projeté. Un modèle numérique 3D régional de cette zone sera construit pour étudier l’impact des éléments structuraux à grande échelle (présence de failles) sur la réponse sismique du site. Des modèles 3D et 2D locaux plus détaillés de sites à l’intérieur de la zone seront aussi créés afin d’étudier la réponse sismique des sols (mouvements de terrain, influencés localement par des phénomènes de liquéfaction). Les géométries et les classes de sols de ces modèles seront variées afin de permettre une généralisation des résultats de l’étude.

Profil du candidat
Le candidat retenu devra posséder de solides compétences en géomécanique et en modélisation numérique appliquée aux Sciences de la Terre (mouvements de terrain, séismes). Des compétences en SIG seraient un plus. On attend du candidat une bonne maîtrise de l’anglais parlé et écrit et la capacité à valoriser ses travaux de recherche en rédigeant des articles scientifiques et en les présentant dans des conférences internationales.

Références
Bird J.J. et Bommer J.J. (2004). Earthquake losses due to ground failure. Engineering Geology, 75 (2), p. 147-179. .
Gorum T. et al. (2013). Complex rupture mechanism and topography control symmetry of mass-wasting pattern, 2010 Haiti earthquake. Geomorphology, 184, pp. 127-138
Keefer D.K. (1984). Landslides caused by earthquakes. Bulletin of the seismological society of America, 95, p. 406-421.
Lenti, L., et Martino, S. (2012). The interaction of seismic waves with step-like slopes and its influence on landslide movements. Engineering Geology, 126, 19–36.
Lenti, L., et Martino, S. (2013). A parametric numerical study of the interaction between seismic waves and landslides for the evaluation of the susceptibility to seismically induced displacements. BSSA, 103(1), 33–56.
Martino S. (2015). Earthquake-Induced Reactivation of Landslides: Recent Advances and Future Perspectives. Natural Hazards. Earthquakes and Their Impact on Society, doi: 10.1007/978-3-319-21753-6_10
Martino, S. et Scarascia Mugnozza, G. (2005). The role of the seismic trigger in the Calitri landslide (Italy): Historical reconstruction and dynamic analysis. Soil Dynamics and Earthquake Engineering, 25, 933–950.
Massey C. et al. (2018). Landslides Triggered by the 14 November 2016 Mw 7.8 Kaikōura Earthquake, New Zealand. Bulletin of the Seismological Society of America ; 108 (3B): 1630–1648. doi: https://doi.org/10.1785/0120170305
Meza-Fajardo K et al. (2019). Surface wave quantification in a highly heterogeneous alluvial basin: Case study of the Fosso di Vallerano valley, Rome, Italy. Soil Dynamics and Earthquake Engineering 120 (2019) 292–300. https://doi.org/10.1016/j.soildyn.2019.02.008.

Mots-clefs: Mouvements de terrain, séismes, effets de site, ondes de surface, modélisation numérique
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