Sujet de thèse IFSTTAR

 

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Fiche détaillée :

Titre : Conséquences comportementales de l’éblouissement sur la conduite automobile

Laboratoire principal - Référent principal AME - LAPEA  -  GABAUDE Catherine      tél. : +33 472142450 
Directeur du laboratoire principal GYSELINCK Valérie  -  
Laboratoire 2 - Référent COSYS - PICS-L  -  BREMOND Roland  -    -  tél. : +33 181668534
Spécialité de la thèse Psychologie, Ergonomie
Axe 1 - COP2017 - Transporter efficacement et se déplacer en sécurité
Site principal Marne-la-Vallée
Etablissement d'inscription UNIVERSITE PARIS 5
Ecole doctorale COGNITION, COMPORTEMENTS, CONDUITES HUMAINES
Directeur de thèse prévu GABAUDE Catherine  -  Université Gustave Eiffel  -  AME - LAPEA
Co-directeur de thèse prévu BREMOND Roland  -  Université Gustave Eiffel  -  COSYS - PICS-L
Type de financement prévu Contrat doctoral  - Université Gustave Eiffel

Résumé

Contexte et objectifs

En France, le trafic automobile nocturne représente environ 10% du trafic quotidien. Cependant, il y a quasiment autant de tués que le jour. De multiples facteurs contribuent à l’accidentalité de nuit, telles que la consommation d’alcool, la fatigue, et les performances visuelles dégradées (Grüner et Ansorge, 2017). Dans ce contexte, l’éclairage routier et automobile permettent d’illuminer la route de manière à se rapprocher de l’éclairage naturel diurne. Cependant, avec les nouvelles technologies de sources à LEDs qui se déploient actuellement, les risques d’éblouissements augmentent (ANSES, 2019). Des sources de lumière très intenses, comme les phares d’un véhicule, un lampadaire, un panneau publicitaire à LEDs, peuvent provoquer un éblouissement pouvant gêner le conducteur et diminuer ses performances de conduite (Theeuwes, 2002 ; Wood, 2002 ; Grüner et Ansorge, 2017). Outre les conséquences sur la sécurité et le confort, il peut également y avoir un impact négatif sur la mobilité de nuit de certains usagers, notamment les personnes âgées, plus sensible à l’éblouissement et souvent atteintes de cataracte (Wood, 2002). Il s’agit donc d’un enjeu de taille dans un contexte de vieillissement de la population.

La littérature en éclairage s’est focalisée sur le développement de modèles en laboratoire permettant de caractériser l’éblouissement d’une installation d’éclairage du point de vue de la gêne ressentie (éblouissement d’inconfort ; CIE, 1995) ou de la dégradation du contraste perçu (éblouissement d’incapacité ; CIE, 2002). Mais ces modèles ne permettent pas de comprendre l’impact de l’éblouissement dans la vie quotidienne, lorsqu’un individu n’est pas concentré sur une tâche artificielle en laboratoire, mais sur une tâche quotidienne comme peut l’être la conduite automobile.

En comparant des indicateurs de sécurité routière avec et sans éblouissement, d’autres travaux se sont intéressés aux conséquences sur la conduite automobile, mais cette littérature est lacunaire. On observe, en présence d’éblouissement, une diminution de la capacité de l’automobiliste à détecter des informations critiques pour sa tâche de conduite (e.g. piétons, obstacles, trajectoires ; Theeuwes et al., 2002 ; Engel et al., 2017 ; Friedland et al. , 2017 ; Kimlin et al., 2017), une diminution de la marge de sécurité lors des tourne-à-gauche (Gray et al., 2011), une variation de la vitesse et de l’accélération, et des mouvement de tête plus importants (Bullough, 2008), laissant présager des changements dans la direction du regard. D’après une étude, les regards se déportent sur la voie du véhicule croisé éblouissant (Graf & Krebs, 1976).

Cependant, ces travaux ne permettent pas aux éclairagistes de tirer des conclusions permettant de maîtriser les conséquences négatives de l’éblouissement avec un objectif de dimensionnement de l’éclairage public et automobile. Pour être en mesure de quantifier l’éblouissement et ses conséquences sur la sécurité routière, il est nécessaire de faire le lien entre les travaux psychophysiques menés en laboratoire et les travaux plus « écologiques » prenant en compte le comportement de conduite, en particulier les modifications du regard induites par l’éblouissement, et l’adaptation de la vitesse.

Problématique de la thèse

Dans ce contexte, on se propose dans cette thèse d’étudier les conséquences comportementales de l’éblouissement sur les performances de conduite automobile, tout en contrôlant les paramètres physiques de l’éblouissement. Il s’agira de comprendre les liens entre la scène visuelle (en particulier les caractéristiques photométriques des sources éblouissantes), l'intensité de l’éblouissement (subjectif et incapacitant), et des indicateurs objectifs du comportement visuel (direction du regard, mouvements oculaires) et de la performance de conduite (vitesse, contrôle de la position latérale, détection d’obstacles, etc.). Pour cela, une série d’expérimentations sera réalisée sur simulateur de conduite en utilisant des scénarios pertinents par rapport à des aspects importants de la tâche de conduite automobile : conduite en ligne droite, dépassement, franchissement d’intersection, lecture de panneaux, etc. L’hypothèse est que l’impact de l’éclairage sur le comportement est différent selon la situation de conduite rencontrée.

Verrous scientifiques

- Evaluer l’impact de l’éblouissement sur la performance de conduite automobile ;
- Identifier les comportements d’adaptation des conducteurs en présence d’éblouissement ;
- Comprendre le lien entre éblouissement, adaptation comportementale et dégradation des performances de conduite ;
- Proposer des pistes pour adapter le diagnostic de l’éblouissement en éclairage en tenant compte de la tâche de conduite automobile.

Déroulement de la thèse

Dans un premier temps, une bibliographie de la littérature sur l’éblouissement et sur la tâche de conduite automobile permettra d’identifier d’une part les indicateurs d’éblouissement et de sécurité existants, d’autre part les scénarios pertinents par rapport à la conduite automobile. Des cas d’usage seront choisis pour centrer la recherche sur des situations pertinentes pour l’éclairage routier, urbain et automobile. Des expérimentations sur simulateur de conduite seront conçues pour recueillir des données relatives à l’éblouissement et aux comportements d’observateurs soumis à des stimuli visuels photométriquement contrôlés. Seront associées des mesures comportementales du regard à l’aide d’un oculomètre, des mesures de performances lors de la réalisation de tâches relatives à la conduite automobile (permettant de caractériser le risque), et le recueil de jugements subjectifs (en particulier sur l’inconfort visuel). L’utilisation d’un simulateur de conduite permettra de s’approcher de conditions réalistes et de recueillir des mesures comportementales de conduite (e.g. adaptation de la vitesse, accélération, trajectoire, etc.). Une expérience en conduite réelle pourra être envisagée en dernière année pour valider les conclusions obtenues, en collaboration avec le groupe de recherche en psychologie appliquée du Cerema à St Brieuc.

D’un point de vue expérimental, des équipements disponibles au laboratoire CoSys/PICS-L seront utilisés (simulation de conduite, écran Haute Dynamique, oculomètre, LEDs, laboratoire de photométrie). Le seul développement technique à réaliser en vue de ces expérimentations concerne la fabrication d’un dispositif éblouissant contrôlé par ordinateur, pour lequel les compétences requises sont disponibles au laboratoire (Cf. par exemple des travaux antérieurs réalisés au laboratoire, Girard et al. (2021a ; 2021b).

Résultats attendus et valorisation

Cette thèse permettra d’identifier les situations d’éblouissement et les niveaux critiques pour une conduite sûre la nuit dans différents scénarios de conduite. Ces nouvelles connaissances permettront de mieux appréhender les enjeux de sécurité routière liés à l’éblouissement la nuit, d’autant plus importants avec une population vieillissante. En outre, une meilleure connaissance des conséquences de l’éblouissement permettrait d’émettre des recommandations quantitatives (e.g. panneau publicitaire), de développer des stratégies pour les nouveaux éclairages adaptatifs routiers (e.g. contre-mesures) et automobiles (e.g. diminuer l’intensité vers une chaussée mouillée pour limiter les réflexions éblouissantes). Des publications académiques sont attendues, notamment dans une revue internationale en psychologie appliquée (e.g. Transportation Research Part F, Human Factors) et en éclairagisme (e.g. Leukos, Lighting Research & Technology).

Références bibliographiques

ANSES (2019) Effets sur la santé humaine et sur l’environnement (faune et flore) des diodes électroluminescentes (LED), 2014-SA-0253, Maisons-Alfort, France.
Bullough, JD, Skinner, NP, Pysar, RP, Radetsky, LC, Smith, AM and Rea, MS (2008) Nighttime Glare and Driving Performance: Research Findings, DOT HS 811 043 Washington: NHTSA
CIE 117 (1995) CIE Discomfort glare in interior lighting Report 117, CIE, Vienna.
CIE 146 (2002) CIE Collection on Glare. Technical Report 146/147, CIE, Vienna.
Engel L, Brémond R, Dommes A (2017) Driving at night with a cataract: Risk homeostasis? Transportation Research Part F: Traffic psychology and behaviour 53: 61-73.
Girard J., Villa, C. & Brémond, R. (2021a). Discomfort Glare from Several Sources: A Formula for Outdoor Lighting. Leukos, the Journal of the Illuminating Engineering Society of North America 17(2), 108-124.
Girard J., Villa, C. & Brémond, R. (2021b). Discomfort Glare from a Cyclic Source in Outdoor Lighting Conditions. Leukos, the Journal of the Illuminating Engineering Society of North America (published online).
Graf, C, Krebs, M (1976) Headlight factors and nighttime vision (Final Report No. 76SRC13). Minneapolis, MN: Honeywell Inc., Systems and Research Center.
Gray R, Perkins SA, Suryakumar R, Neuman B, Maxwell WA (2011) Reduced effect of glare disability on driving performance in patients with blue light-filtering intraocular lenses. J Cataract Refract Surg. 37, 38-44.
Grüner M, Ansorge U (2017) Mobile eye tracking during real-world night driving: A selective review of findings and recommendations for future research. Journal of Eye Movement Research, 10(2):1-18.
Friedland H, Snycerski S, Palmer EM, Laraway S (2017) The effectiveness of glare-reducing glasses on simulated nighttime driving performance in younger and older adults. Cogn. Technol. Work.; 19(4):571-586
Kimlin JA, Black AA, Wood JM. (2017) Nighttime driving in older adults: effects of glare and association with mesopic visual function. Invest Ophthalmol Vis Sci. 2017; 58: 2796–2803
Theeuwes J, Alferdinck JWAM, Perel M (2002) Relations between glare and driving performance. Human Factors; 44(1):95-107.
Wood J (2002) Age and Visual Impairment Decrease Driving Performance as Measured on a Closed-Road Circuit. Human Factors 44(3): 482-494.

Mots-clefs: Conduite automobile, éblouissement, sécurité routière, simulation de conduite
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