Sujet de thèse IFSTTAR |
English versionFiche détaillée :
Titre : Modélisation couplée des performances de résistance, de durabilité et d’ouvrabilité du béton pour une conception environnementale
Laboratoire principal - Référent principal MAST - GPEM - VENTURA Anne tél. : +33 240845811 Directeur du laboratoire principal RICHARD Patrick - Spécialité de la thèse Génie Civil Axe 2 - COP2017 - Améliorer l'efficience et la résilience des infrastructures Site principal Nantes Etablissement d'inscription UNIVERSITE GUSTAVE EIFFEL Ecole doctorale Sciences de l'Ingénierie et des Systèmes (SIS) Directeur de thèse prévu VENTURA Anne - Université Gustave Eiffel - MAST - GPEM Co-directeur de thèse prévu FERAILLE Adélaïde - ENPC - Navier Type de financement prévu Contrat doctoral - Université Gustave Eiffel Résumé
CONTEXTE
Le béton est le produit manufacturé le plus consommé au monde : en 2020, 14 milliards de m3 ont été produits (Global Cement and Concrete Association, 2021). Dans le futur, cette production est appelée à croître continuellement, du fait de l’augmentation de la population et des migrations de cette dernière vers les zones urbaines. Les projections prédisent jusqu’au doublement des surfaces construites entre 2020 et 2050, ce qui représenterait une augmentation de 183 milliards de m2 (International Energy Agency, 2022). En raison du contexte actuel et futur, il est de plus en plus nécessaire de réduire les impacts environnementaux du béton, ainsi que du ciment qui, même s’il représente seulement 7 à 20 % de la masse dans le béton, est responsable d’environ 95 % de ses émissions de CO2 (Material Economics, 2019).
Par conséquent, les stratégies de décarbonation du béton (Cao et al., 2021; Global Cement and Concrete Association, 2021; Material Economics, 2019; The Shift Project, 2022) recommandent de nombreuses actions sur le ciment, notamment : substituer le clinker par d’autres matériaux (le clinker est en effet responsable de la majeure partie des émissions de CO2, ciment et notamment en raison de la décarbonatation du calcaire), réaliser du CCUS (Carbon Capture, Utilization and Storage), réduire les combustibles fossiles (e.g. en les remplaçant par des combustibles secondaires issus de la biomasse ou de déchets), en optimisant l’efficacité thermique des fours. Mais ces leviers, à eux seuls, ne permettent pas de décarboner suffisamment le béton. De plus, ils présentent quelques limites. La substitution du clinker par des matériaux alternatifs est tributaire de la disponibilité de ces ressources (Maitenaz, 2022). De nouvelles substitutions pourraient réduire la pression, mais elles doivent en amont répondre aux exigences normatives et assurantielles, retardant leur usage réel dans le secteur de plusieurs années. La disponibilité des combustibles secondaires est aussi une problématique, car leur production est dépendante de la fin de vie d’autres produits et de spécificités territoriales (ce sont des déchets), leur usage doit être partagé avec d’autres industries (e.g. centrale d’incinération des déchets avec production d’électricité pour les ménages), et l’intensification systématique de leur usage peut également conduire à favoriser leur production dans un effet de cercle vicieux.
La décarbonation du béton doit ainsi considérer plusieurs leviers en même temps. Au-delà du ciment, c’est aussi sur le béton que des actions peuvent se mener. L’intérêt peut notamment se tourner vers la sobriété. Plutôt que changer sa nature (e.g. en y intégrant de nouvelles additions, des ciments innovants), l’objectif est plutôt d’améliorer le béton et d’optimiser son usage par (Cao et al., 2021; The Shift Project, 2022) :
- L’amélioration et le contrôle de la qualité (i.e. résistance) du ciment et du béton, pour réduire les quantités utilisées à service équivalent et éviter le surdimensionnement.
- L’amélioration de la durabilité du béton face aux expositions environnementales, pour allonger la durée de vie du bâtiment ou de l’ouvrage dans lequel le béton est utilisé.
Deux thèses menées à l’Université Gustave Eiffel ont permis d’explorer cette approche de sobriété pour le béton (Dahanni, 2025; Ta, 2017), en s’intéressant aux fonctionnalités de résistance et de durabilité du béton. (Ta, 2017) a travaillé sur la durabilité en condition de carbonatation (exposition à l’air et à l’humidité), tandis que (Dahanni, 2025) a exploré la durabilité à l’exposition en milieu marin (i.e. dégradation par diffusion des ions chlorure dans le béton). Les travaux de (Ta, 2017) ont démontré qu’augmenter la classe de résistance du ciment permet de réduire sa quantité dans le béton, et par conséquent de diminuer fortement les impacts environnementaux. Toutefois, augmenter la classe de résistance provoque des changements dans le procédé de production du ciment qui n’ont pas été investigués dans cette thèse. Par la suite, (Dahanni, 2025) a étudié les conséquences de l’augmentation de la finesse du ciment pendant sa phase de production (i.e. étape du broyage). Ce changement en particulier permettrait d’améliorer la résistance et la durabilité du béton sans rajouter d’impacts environnementaux significatifs.
Si ces travaux existants (Dahanni, 2025; Ta, 2017) ont confirmé qu’augmenter la finesse permet d’augmenter la résistance et la durabilité du ciment et du béton sans provoquer d’augmentation importante des impacts environnementaux, il n’est pas encore possible de modéliser la relation entre la finesse, la résistance et la composition du ciment et du béton, qui permettrait d’estimer la formulation adéquate en fonction de l’usage désiré, et d’assurer une réduction des impacts environnementaux.
De plus, les additions minérales, en remplaçant en grande quantité le ciment dans le béton (e.g. laitiers, cendres calcinées), n’offrent pas systématiquement une réduction des impacts, car elles peuvent affecter les performances du béton (Miller, 2018). (Ta, 2017) a pu montrer des différences environnementales à partir des données moyennes européennes disponibles selon les classes de ciment normatives (CEM I, CEMIII, …), mais sans vraiment paramétrer les formulations du ciment. (Dahanni, 2025) a effectué ce paramétrage qui devient possible à partir de données des fiches techniques, mais uniquement pour les laitiers de hauts-fourneaux, ou GGBS (Ground Granulated Blast furnace Slag).
Enfin, l’ouvrabilité du béton est une fonctionnalité essentielle encore non considérée jusqu’ici. En effet, si l’on sait que le rapport eau sur liant doit être minimisé pour maximiser à la fois la résistance et la durabilité du béton, l’eau reste nécessaire pour permettre une mise en œuvre à l’état liquide. L’eau peut aujourd’hui être minimisée par l’ajout d’adjuvants, des produits chimiques potentiellement néfastes.
Ainsi, pour favoriser la décarbonation du béton, il est nécessaire de trouver un compromis entre ces différentes fonctions (la résistance, la durabilité, l’ouvrabilité) et de pouvoir les lier pleinement aux formulations du ciment et du béton.
SUJET
L’ambition de ce sujet de thèse est de développer un modèle de formulation du béton couplant résistance, durabilité, ouvrabilité et impacts environnementaux. Il s’agira d’une part d’expliciter les liens entre la formulation ciment et béton avec la résistance, la durabilité et l’ouvrabilité du béton. Il s’agira d’autre part de modéliser l’Analyse de Cycle de Vie de ce béton, avec notamment des adjuvants chimiques, dont certains types sont absents des bases de données (Maitenaz, 2022).
Plusieurs travaux existants pourront être exploités :
- Résistance et ouvrabilité : Le logiciel BétonLabPro de l’Université Gustave Eiffel, qui simule numériquement les propriétés d’une formulation de béton.
-Durabilité : Modèles de dégradation du béton par carbonatation (Ta, 2017), et par les chlorures de l’eau de mer à l’échelle du béton armé (Dahanni, 2025) et à multi-échelle (Atallah, 2024), menés dans le cadre du projet ANR DEMCOM à Nantes Université.
- Impacts environnementaux : Modèles d’ACV (Analyse de Cycle de Vie) du ciment avec ou sans GGBS (Dahanni, 2025), d’une structure en béton armé (Ta, 2017).
De l’intelligence artificielle de type PINNs (Physics-Informed Neural Networks) pourra être envisagée pour simuler les comportements physico-chimiques des formulations sans et compléter le champ d’application du modèle sans expérimentations de laboratoire trop lourdes (en ressources et en temps).
Le modèle construit se devra d’être conçu pour servir de base à un outil d’aide à la décision pour les acteurs du secteur, comme les producteurs de béton, les bureaux d’étude ou les architectes. Il permettra, pour un cas donné, d’identifier la (les) formulation(s) adéquate(s) pour le béton qui minimisent ses impacts environnementaux. Pour atteindre cet objectif, plusieurs méthodes d’aide à la décision (en analyse multi-critère ou multi-objectifs) pourront être explorées.
L’efficacité du modèle sera testée sur plusieurs cas d’application.
Le modèle sera ouvert et en libre accès, pour autoriser des améliorations futures.
CANDIDAT.E
Profil en sciences de l’ingénieur ou génie civil.
Connaissance et/ou expérience : Analyse de Cycle de Vie, programmation Python, analyses statistiques.
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
Atallah, J., 2024. Modélisation multi-échelles des propriétés de transport pour l’évaluation de la durabilité du béton armé en milieu marin. Université de Nantes, France.
Cao, Z., Massanet, E., Tiwari, A., Akolawala, S., 2021. Decarbonizing Concrete: Deep decarbonization pathways for the cement and concrete cycle in the United States, India, and China. Industrial sustainability analysis lab - Climateworks foundation.
Dahanni, H., 2025. Modélisation des impacts environnementaux et de la durabilité du béton en milieu marin. Université de Nantes, France.
Global Cement and Concrete Association, 2021. Concrete future. The GCCA 2050 cement and concrete industry roadmap for net zero concrete.
International Energy Agency, 2022. Global buildings sector CO2 emissions and floor area in the Net Zero Scenario, 2020-2050.
Maitenaz, S., 2022. Optimisation and digital fabrication of concrete structures. Ecole des Ponts ParisTech.
Material Economics, 2019. Industrial Transformation 2050 - Pathways to Net-Zero Emissions from EU Heavy Industry.
Miller, S.A., 2018. Supplementary cementitious materials to mitigate greenhouse gas emissions from concrete: can there be too much of a good thing? J. Clean. Prod. 178, 587–598. https://doi.org/10.1016/j.jclepro.2018.01.008
Ta, V.L., 2017. Méthode innovante pour la conception environnementale et durable de structures en béton armé soumises à la carbonatation. Université de Nantes, France.
The Shift Project, 2022. Décarboner la filière ciment-béton dans le cadre du plan de transformation de l’économie française.Mots-clefs: Production de béton ; Analyse de Cycle de Vie ; Durabilité ; Ouvrabilité ; Couplage de modèles
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