De nos jours, il est encore rare de croiser des femmes conductrices de deux-roues motorisés (2RM) sur nos routes françaises. Pourtant, elles sont de plus en plus nombreuses à circuler ainsi. Ce nouveau contexte permet aux scientifiques de mettre en évidence l’importance du genre dans les comportements à risques accidentels.

Les « motardes », une catégorie d’usagères peu connue
Actuellement, les recherches consacrées à l’étude des conducteurs de 2RM¹ ne tiennent pas ou très peu compte des différences de sexe. Seule une étudeⁱ, dont les résultats publiés en 2009 ont été relayés par la presse spécialisée, a montré que les femmes sont de plus en plus nombreuses à conduire des deux-roues motorisés, notamment des grosses cylindrées (les femmes représentaient 5% des conducteurs de motos de plus de 125 cm³ en 2002 et 10% en 2012ⁱⁱ).
Nos sociétés modernes tolèrent et reconnaissent progressivement les femmes motocyclistes dans le monde très masculin de la moto. A ce jour, il existe peu de publications scientifiques et d’informations grand public à ce sujet. Pour pallier à ce manque, des travaux menés à l’Ifsttar mettent en lumière les différences femmes-hommes conducteurs de 2RM¹, en matière de risque d’accidents et de comportements routiers.

Des différences entre femmes et hommes conducteurs de deux-roues motorisés

Les Bulletins d'Analyse des Accidents de la Circulation (BAAC²) indiquent que les femmes sont nettement moins impliquées que les hommes dans les accidents corporels de 2RM¹ et encore moins dans les accidents mortelsⁱⁱⁱ. Plus précisément, l’étude des comportements à risques accidentels des conducteurs de grosses cylindrées^iv indique que les hommes commettent plus de violations au code de la route et prennent plus de risques délibérés au guidon. Pour autant, les conductrices de scooters (≥ 50 cm³) adoptent de plus en plus de conduites à risque et illégales, contrairement aux « motardes ».

Face à ces constats, une étude complémentaire révèle que le genre (masculin/féminin) aurait plus d’impact sur les comportements à risque que le sexe (homme/femme)^v. En effet, les résultats montrent que les individus qui ont un degré de masculinité élevé et un faible degré de féminité déclarent commettre plus de violations. A l’inverse, les individus qui ont un degré de féminité élevé et un faible degré de masculinité déclarent faire plus d’erreurs de conduite³.

La question du genre offre ainsi de nouvelles opportunités d’études sur les comportements à risque des conducteurs de deux-roues motorisés.

¹ 2RM : Deux-roues motorisés
² Les Bulletins d'Analyse des Accidents de la Circulation (BAAC) est une base de donnée regroupant des fiches statistiques remplies par les Forces de l'Ordre à la suite d'un accident corporel sur lequel ils ont eu à se déplacer.
³ Le sexe fait référence aux aspects biologiques et physiologiques qui différencient les hommes des femmes (anatomie d'une personne, système reproducteur et caractères sexuels secondaires), alors que le genre est une construction sociale qui fait référence aux rôles sociaux fondés sur les croyances et stéréotypes liés à chaque sexe (rôles masculins et/ou féminins).

i Fradet, A.-H., Portrait du conducteur de 2 roues d’aujourd’hui (No. 410F80) (p. 87). Paris: GEMA Prévention / TNS Sofres, 2009.
ii ONISR, La sécurité routière en France. Bilan de l’accidentalité de l’année 2013 (La Documentation Française). Paris, 2015.
iii Coquelet, C., Granié, M.-A., & Griffet, J., Les femmes en deux-roues motorisés: Evolution de l’accidentalité. Poster presentation presented at the 10ème Journée de l’Ecole Doctorale Sciences du Mouvement Humain, Montpellier, 2014.
iv Coquelet, C., Granié, M.-A., & Griffet, J. (soumis), Sex and Age Differences on Risky Behaviors Among French Motorcycle Riders. Traffic Injury Prevention.
v Coquelet, C., Granié, M.-A., & Griffet, J. Conformity to gender stereotypes, motives for riding and aberrant behaviors of French motorcycle riders. Journal of Risk Research, 2018. DOI: 10.1080/13669877.2018.1454494.