En vieillissant, les capacités physiques, sensorielles et cognitives diminuent légèrement pour certains et plus fortement pour d’autres. Cela peut altérer les capacités de conduite des personnes. En réponse à cette diminution de capacités, la plupart des conducteurs âgés adaptent leurs habitudes de conduite. Récemment, l’Ifsttar s’est penché sur les différences entre hommes et femmes au cours de ce processus de « régulation de la conduite ».

L’identification des facteurs qui impactent la « régulation de la conduite »

Les conducteurs âgés, en vieillissant, mettent en place des stratégies de « régulation de la conduite ». Celles-ci consistent par exemple à diminuer le nombre de kilomètres conduits, à éviter les situations de conduite jugées difficiles, et cela jusqu’à l’arrêt définitif de la conduite.

Laetitia Marie Dit Asse, doctorante à l’Ifsttar, s’est intéressée aux déficits sensoriels, physiques et cognitifs pour lesquels les conducteurs et conductrices âgés adaptent leurs habitudes de conduite, et ceux pour lesquels aucune modification de l’activité de conduite n’est observéeⁱ. La question de l’arrêt de la conduite chez les conducteurs et conductrices, qui présentent une démence à un stade débutant de la maladie, était aussi au cœur de ses travaux. Ces derniers ont été menés sur près de 10 000 personnes âgées suivies dans le cadre d’un vaste projet de recherche mené par l’Inserm depuis 2000.

Les femmes arrêtent plus tôt de conduire

Il en résulte que les femmes, lorsqu’elles sentent leurs capacités s’amoindrir, diminuent davantage les distances conduites, et elles le font plus tôt que les hommes. Le plus souvent, les hommes attendent d’être face à une pathologie pour réduire leurs trajetsⁱⁱ.

Dans le cas de la démence, qu’ils soient hommes ou femmes, la grande majorité des conducteurs qui développent ce syndrome cessent de conduire plus tôt. En revanche les femmes interrompent la conduite en moyenne 4 ans avant le diagnostic, contre 2 ans et demi pour les hommes. Au moment du diagnostic, 45 % des hommes et 74 % des femmes ont déjà cessé de conduire. Trois ans après le diagnostic, hommes et femmes ont la même probabilité d’arrêter de conduireⁱⁱⁱ.

Hommes et femmes n’ont donc pas la même approche de la « régulation de la conduite », que ce soit dans le vieillissement normal ou le vieillissement pathologique. Les femmes cessent de conduire avant que les troubles impactent leurs capacités de conduite ou leurs activités de la vie quotidienne, à la différence des hommes. D’autres facteurs restent à explorer, tels que la personnalité, les stéréotypes de genre, la survenue d’événements de vie et de santé, le rôle des accompagnants ou encore la perception des déficits liés à l’âge. La prise en compte de ces spécificités est essentielle dans le conseil que l’on peut donner en matière d’accompagnement des conducteurs âgés vers l’arrêt de la conduite.

i Marie Dit Asse L, (dirigée par B. Laumon et encadrée par S. Lafont). Régulation de la conduite automobile des hommes et des femmes âgées. Ifsttar, Bron-Lyon. Thèse de doctorat - Spécialité Épidémiologie et Santé Publique - Université Claude Bernard Lyon 1, 31 mars 2015.
ii Marie Dit Asse L, Fabrigoule C, Helmer C, Laumon B, Lafont S. Automobile driving in seniors: Factors affecting driving restriction in men and women. Journal of American Geriactrics Society. 2014, 62(11): 2071-8.
iii Marie Dit Asse L, Fabrigoule C, Helmer C, Laumon B, Berr C, Rouaud O, Auriacombe S, Lafont S. Gender effect on driving cessation in pre-dementia and dementia: results of the 3C population-based study. International journal of Geriatric Psychatry. August 23 2016: 10.