Qu'est ce qu'un véhicule autonome ?

Dossiers thématiques juin 2017 InnovationTransportSécurité routièreComportement humain

Par Sébastien Glaser, chercheur en automatique – Département COSYS, Laboratoire LIVIC

Imaginer un véhicule qui réalise une mission complexe en interagissant avec son environnement, sans action du conducteur, a longtemps fait partie de l’univers de la science-fiction ou des artistes. Pourtant l'automatisation de la conduite, permettant de déléguer toute ou partie de la tâche de conduite vers un système automatisé, devient aujourd'hui une réalité, popularisée par les expérimentations du véhicule autonome de Google (en 2010).

Le terme autonomie vient des racines grecs « Auto », soi-même, et « Nomos », les règles. Ainsi, un véhicule autonome doit être capable de réagir par soi-même suivant des règles définies. Afin de réaliser les missions qui lui seront données, un tel véhicule doit percevoir l’environnement et le comprendre, décider d’une manœuvre et en planifier sa réalisation.

Pour cela, il est doté de différentes technologies de capteurs (laser à balayage, radar et caméra). Les signaux des capteurs sont ensuite traduits, à l’aide d’algorithmes, sous forme d'informations compréhensible par les machines et indispensables à la conduite (marquage au sol, signalisation, bâtiments, véhicules, piétons, etc.). A ce titre, la SAE1 propose différents niveaux d’automatisation et d’autonomie, en fonction de l’intrusion de ces systèmes dans la conduite.
Cela permettra d'aborder de nombreux enjeux sociétaux tels que la sécurité routière, la fluidité du trafic, la diminution d'énergie et la mobilité pour tous. Ce dernier point est primordial pour nos sociétés vieillissantes et les personnes porteuses de handicaps. En effet, cette possibilité de mobilité est valorisante et permet, aux personnes concernées, de retrouver une part d’autonomie.

 

 

 

 

Dans un premier temps, une expérience collective

Le véhicule autonome, dans le cadre des nouveaux usages de la mobilité, est souvent associé au téléphone portable et à la révolution qu’il a engendrée. Si l’objet transport autonome est aujourd’hui principalement vu sous l’angle du véhicule, de nombreux domaines peuvent en bénéficier tels que le transport de marchandise, le taxi autonome ou le transport collectif.

C’est dans ce dernier domaine que des expérimentations ou des intégrations ont déjà été réalisées (navettes autonomes desservant les aéroports telles OrlyVal et Navya Arma ou métros autonomes). Le point commun de ces transports reste le domaine dans lequel le véhicule évolue : il est fortement protégé. En effet, l’étape de perception de l’environnement reste complexe et nécessite d’être effectuée avec un grand niveau de performance et de fiabilité. Ainsi, pour simplifier l’étape de décision et de planification,  les réactions du véhicule doivent être limitées : le contrôle latéral est contraint (par des rails ou une restriction forte du guidage par des murs) et seul le contrôle longitudinal peut varier dans des plages importantes.

 

L’autoroute, une voie toute tracée pour le véhicule particulier

Les parties prenantes ont ainsi reproduit ce schéma au niveau du véhicule personnel. Dans un premier temps, c’est le domaine autoroutier qui est visé, avec deux applications principales : la conduite à grande vitesse sur de longs trajets et la conduite en situation saturée à basse vitesse.

Le domaine autoroutier présente de nombreuses similitudes avec les environnements protégés précédents : le guidage est simplifié (marquages présents et normalisés), les interactions avec les autres usagers sont limitées (peu de piétons et d’obstacles, trajectoires des autres véhicules compréhensible et prédictible) et les réactions possibles contraintes.

Ce développement fait aussi écho à l’une des principales exigences des conducteurs qui concerne la conduite sur autoroute à grande vitesse. Aujourd’hui, Tesla et des constructeurs haut de gamme promeuvent des systèmes automatisés pour ce type d’usage, fortement apprécié par les usagers.

 

 

 

Qu'est ce qu'un véhicule autonome ? - Ifsttar - Extrait des objectifs de recherche de la Nouvelle France Industrielle pour le véhicule autonome - Les feuilles de route d’usages du véhicule autonome, cas du véhicule particulier http://pole-moveo.org/appels/plan-nfi-objectifs-de-recherche-vehicule-a

Extrait des objectifs de recherche de la Nouvelle France Industrielle pour le véhicule autonome

Les feuilles de route d’usages du véhicule autonome, cas du véhicule particulier

 

Une question d’implication

Néanmoins, la délégation de la conduite reste aujourd'hui fortement limitée. Sur le plan technique d'une part, les fonctions disponibles ou en passe de l'être ne le sont qu’au niveau 2 du classement SAE 1. Le conducteur est encore dans l'obligation de superviser le système, l'environnement et d'agir immédiatement en cas de défaillance. D’autre part, des mésusages ont déjà été identifiés, notamment lorsque le conducteur renforce sa confiance dans le système et se permet d’autres activités, comme cela a été le cas pour l’accident de la TESLA. Pour cela, il faudrait dès à présent un système, de niveau 4, capable de se superviser, de superviser l'environnement et d'agir de lui-même en cas de défaillance.

Le véhicule autonome, tel que nous pouvons nous l’imaginer, deviendra réalité dans quelques années. D’ici là, il devra se localiser précisément en tenant compte de son environnement et savoir prendre des décisions afin de planifier ses trajectoires en minimisant les contraintes sur les autres usagers.

 

1. SAE International « Society of Automotive Engineers » est une association mondiale de plus de 128 000 ingénieurs et experts techniques associés de l'industrie aérospatiale, automobile et des véhicules commerciaux. http://fr.sae.org/